Au Carrefour de l’Achoura

Ce spot publicitaire est aussi frais que la voix émouvante d’un bout de chou au téléphone :

– Allo, bonjour madame, j appelle pour vous parler de mon papa adoré. En ce moment, il travaille dur sans pouvoir répondre a tous nos besoins; s’il n’a plus d’argent, qui pourrait me payer une poupée ?
– Ne t inquiètes plus ma puce, Crédit Sésame est la pour joindre les deux bouts !

Décidément, le gang des papas gâteaux ne lâche pas prise ! Quelques semaines a peine après la visite du Père Nol, voila Baba Aïchour qui rapplique au grand bonheur des petits démunis qui n’ont pas souvent l’occasion de garnir leurs étagères en jouets. Si grâce aux liquidités du crédit tous les consommateurs Marocains sont presque égaux pour faire bonne chère le jour de l’Achoura, rares sont les jeunes qui en connaissent l’origine !

Célébré comme le dixième jour du nouvel an de l’Hégire, Achoura (dix en arabe) revêtit son caractère sacré chez les musulmans grâce aux recommandations du prophète Mohammed qui invita les musulmans a faire preuve d’abstinence pendant deux jours, par solidarité vis-a-vis de son proche, le prophète Moïse. Cette fête qui fait référence aux deux religions, l’Islam et le Judaïsme, remonte a l’année 622. En cette date-la, lorsque le prophète Mohammed et ses fidèles arrivent a Yathrib, une tribu juive y observait sa journée de je»ne absolu en implorant le pardon du Dieu pour avoir vénéré le Veau d’or durant l’Exode de Moïse. Si le je»ne de l’Achoura est recommandé par notre Prophète, il n’est pas obligatoire, puisqu il n’est mentionné nul part dans le Coran. Cependant, au milieu de ce jour, les célébrations de cette fête prennent différents faciès a travers le monde musulman, en fonction des courants principaux et des abstractions culturelles locales.

Au Maroc, pays sunnite par tradition, la fête est de rigueur ! En cette journée, les enfants sont choyés par leurs grands, grâce aux cadeaux offerts sous formes de jouets et de vêtements ; la charité et le partage acquièrent plus d’adeptes pour penser aux nécessiteux. Le soir venant, le repas de circonstance est suivi d’un thé associé aux fruits secs. Sécurité oblige, on n’est plus exposé aux pétarades en tout genre, ni effrayé par le feu de camp qui fut la joie des petits voltigeurs. Mais pour sentir la fièvre de cette fête, rien ne vaut le détour par le quartier populaire où la tradition se perpétue, surtout grâce aux filles qui jouent du tam-tam. Il parait aussi que ce soir-la, certaines toquées du culte satanique, abusent de leur chausse-trape pour leurrer un maximum de victimes. n’oublions surtout pas le lendemain de la fête, quand tous les mômes du quartier s’autoproclament sapeurs pompiers pour asperger qui que se soit !

Dans les pays, majoritairement chiites, le jour de l’Achoura est synonyme de deuil pour commémorer la mort de l’imam Hussein, petit fils de notre Prophète. c’est aussi jour de pèlerinage a Karbala, ville sainte en Irak, où se trouve la tombe de cet Imam qui est la figure emblématique du Chiisme. Toute au long de cette journée, les hommes arpentent les lieux publics en se frappant la poitrine pour afficher leur peine unanime contre le meurtre de l’imam Hussein dont le corps fut décapité et mutilé durant la guerre sainte de Karbala en 680.

Si les rejetons des sans soucis se payent tout genre de gadget au fil de l’année, leur intérêt est peu réveillé par le jouet simplet qui demeure toutefois le nerf de la créativité. c’est un peu la revanche des petits défavorisés sur leurs camarades nababs ! n’oublions pas que le crédit du cœur n’exige aucun gage pour penser, tout au long de cette nouvelle année, aux enfants démunis.

Merci.

Abdelaziz Cherif

Auteur/autrice