Azemmour entre rêves et réalité

Située a 16 km au Nord d’El Jadida et a 72 km au Sud de Casablanca, Azemmour se devise en deux parties distinctes: l’ancienne ville entourée de remparts (comprenant la casbah et la médina) et la nouvelle ville qui renferme des quartiers hors de l’enceinte.

A 2 km au nord d’Azemmour, il y a la magnifique plage d’El Haouzia qui sera, dès la fin 2009, une destination touristique de premier ordre sur le plan international grâce a la station touristique Mazagan. Cependant, Azemmour souffre de plusieurs maux. Ainsi, elle ne pourra pas tirer bénéfices de cette station touristique si on ne pense pas vraiment a la mettre sur les bons rails. En ce qui concerne la fondation de la cité d’Azemmour, les uns disent qu elle date de la période carthaginoise ou romaine et les autres affirment que se sont les Berbères qui l’ont bâtie. De même, concernant son origine, on ne sait rien de précis… Le nom de la ville a connu des changements d’Azama a Azemmour qui signifie en berbère le rameau d’olivier. Prosper Ricard dans “Guide bleu Maroc”: «L antique Azama fut un comptoir très fréquenté par les Carthaginois. On y a découvert des f»ts de colonnes de marbre qui semblent appartenir a l’époque punique».

D autre part, l’Islam a atteint Azemmour et sa région en l’an 667, soit l’an 45 de l’Hégire par Moussa Bnou Noussayer qui y construisit deux mosquées. l’Islam fut accepté comme une délivrance par la population et, surtout, celle la plus assujettie aux impôts. Et quand M. Bnou Noussayer mourut, son neveu Ayoub Ben Abid Lekimi lui succéda et fit d’Azemmour la capitale des Msamda. Au Maroc, Azemmour est connue grâce au saint Moulay Bouchaïb décédé en 1166 a l’âge de 90 ans. Et il ne faut pas oublier aussi le grand résistant El Ayyachi, qui, par son courage et sa témérité, a su donner a l’occupant portugais du fil a retordre .
De nos jours, l’ancienne médina d’Azemmour, dépositaire d’un passé historique millénaire, a perdu quelques atouts de son équipement socio-spatial originel. Ainsi, plusieurs édifices historiques, qui sont des bâtiments de valeur et disposant de statuts privilégiés tels que «La Capitainerie», «Bordjs», «Dar El Kadi», les portes de bastions, la citadelle portugaise, les passages couverts et les arcades, sont désaffectés et subissent une dégradation totale.

Il en va de même pour les anciennes maisons. Bref, le processus de délabrement est général et touche tous les édifices historiques de l’ancienne médina. Par conséquent, le paysage de cette cité historique ne transmet plus de message culturel, il devient ainsi anachronique, se dégrade et se marginalise.
En plus, la médina d’Azemmour a connu un abandon concernant des métiers traditionnels (des tisserands, fileuses, cordonniers, tanneurs, forgerons…).
Ceci dit, la cité d’Azemmour a toutes les potentialités pour jouer un grand rôle dans le développement du secteur touristique. Le cadre naturel enchanteur des sites balnéaires (El Haouzia), des monuments historiques et la situation géographique font de cette ville un lieu prisé des touristes. Mais supposons que les touristes affluent sur Azemmour, que leur proposent donc concrètement les structures touristiques de la ville aujourd hui? Aucune infrastructure de base! Il n’y a aucun hôtel où un touriste puisse passer quelques jours a l’exception de quelques maisons d’hôtes telles que l’Oum Errebia et Azama. Même chose pour la restauration.

Il n’existe aucun restaurant qui peut donner envie aux touristes d’apprécier un service de qualité, une cuisine de choix… Il n’y a aucun lieu de promenade dont peut profiter le visiteur et où il peut acheter quelques objets de souvenirs a part un soi-disant complexe d’artisanat où quelques téméraires artisans luttent de toutes leurs forces pour perpétuer l’art traditionnel de cette cité.
Pis encore, la ville d’Azemmour souffre d’un manque chronique de loisirs dignes de ce nom, c’est-a-dire des lieux décents et chaleureux, car a part les cafés, ultimes refuges de la majorité des visiteurs et habitants, il n’y a pas d’autres lieux où passer du temps. De la, l’intérêt et la nécessité d’imaginer de nouveaux espaces d’animation adaptés aux besoins spécifiques des visiteurs et de la population locale comme par le passé.

Il est a rappeler qu Azemmour était une source d’inspiration et de création poétique et littéraire pour un grand nombre de penseurs et écrivains. On espère revoir la cité historique, modèle de tous les temps, refuge d’éminentes personnalités intellectuelles, telles que Roland Barthe, Michel Foucault, Abdallah Laroui et autres et lieu de diverses activités culturelles et artistiques d’autrefois.

Symbole d’une culture raffinée

Azemmour était le fief du malhoune , parvenu de Tafilalet. Mais elle est aussi un lit fécond des arts plastiques que nous illustrent Chaïbia, Habbouli, Rahoul, Al Azhar et tant d’autres artistes. Azemmour tient aussi le flambeau de la Aïta doukkaliya, en parallèle avec la Aïta abdiya. Elle rassemble également tout le prestige des arts traditionnels des Doukkala, en témoignent la tapisserie, la broderie, l’art culinaire, le tatouage… Le dragon brodé en couleur grenat, que les Marocains ne connaissent pas bien malheureusement, est un symbole d’une culture raffinée et d’un savoir-faire sans égal d’une région qui doit se sentir timide en comparant son présent a
son passé.

Abdelmajid Nejdi
Le Matin

Auteur/autrice