El Jadida : le théâtre de la honte

Après le jumelage d’El Jadida avec Sète, une délégation de cette ville a visité notre théâtre et constaté de visu son état lamentable. La décision salvatrice de nous envoyer une équipe complète de techniciens, fut illico prise, afin de mettre fin a un tel gâchis culturel.

Quand les travaux furent terminés, notre théâtre avait pour la première fois de son histoire repris son Look initial. Il est redevenu tout simplement le joyau régional et national dont on pouvait tous s’enorgueillir et en redevenir fier.

Il faut dire qu après la démolition du théâtre de Casablanca : un autre crime contre notre mémoire, le notre est resté pratiquement le seul dans ce pays, qui puisse encore s’enorgueillir d’une telle architecture.

Ce haut lieu de culture, n’est plus de facto, un « simple » théâtre, mais un monument a sauvegarder, quel qu il en soit le prix.

Trois conseils municipaux se sont succédés depuis cette époque et autant d’années perdues. Autant d’années de statu quo et de léthargie. Aucun parmi eux n’a su quoi faire avec ce bijou. Un bijou qui pour s’être trouvé entre certaines mains incultes, donnait l’impression de constituer de devenir un immense fardeau.

Et ce qui devait arriver arriva.

Son délabrement est aujourd hui visible a l’œil nu et chaque jour qui passe représente « une nouvelle ride » qui converge vers sa défiguration finale. Cet outrage du temps qui semble prendre le dessus sur nous avec tant de facilité, est d» a la médiocrité de ceux qui possèdent, O malheur, les destinées culturelles de cette ville entre leurs mains corrompues.

Personne parmi nos honorables élus, n’a compris que ce théâtre a besoin tout simplement, pour ne pas dire tout bêtement, d’un Directeur Artistique.
Comment est ce possible de vouloir diriger un théâtre, sans Directeur Artistique ?

Dans les années soixante dix ce théâtre en avait bien un en la personne de Feu Mohammed AFIFI. Il avait connu alors ses grands moments de gloire et la toute petite province d’El Jadida de l’époque, avait déja sa propre troupe de théâtre et passait a la télévision nationale.Une fierté incommensurable, quant on sait que le Maroc ne possédait a l’époque qu une seule chaine, pour une émission quotidienne, de 5 heures.

Qui parmi les jdidis de souche où de cœur, ne se rappelle t-il pas encore, la célébrer pièce « Aamayl J HA » et un peu plus tard, la troupe “Arouss Achaouatei”

Monsieur AFIFI s’occupait de toute la programmation de l’année. Les rendez vous étaient pris longtemps a l’avance. On pouvait savoir en janvier ce qu il y aura au mois d’aout, car Afifi en fin professionnel, avait horreur de l’improvisation.

Et comme le travail sérieux qui finit par donner ses fruits, notre théâtre dégageait alors un bénéfice au profit de la municipalité, après déduction de tous les frais et des salaires des fonctionnaires !

Et alors que tout semblait aller comme sur des roulettes, et sans savoir trop, ni pourquoi ni comment, on a mis de coté les roulettes pour y mettre a la place des boulons.

Autrement dit, on a préféré se passer des services d’un directeur artistique, pour faire passer ce théâtre sous la coupole du service culturel (sic) de notre commune. On venait ainsi et presque délibérément de sonner le glas de ce théâtre et de le juger bon pour la guillotine.

Feu Mitterrand ne répétait il pas autour de lui, que le véritable niveau de développement d’un peuple se mesure au niveau de sa culture ?

On peut être un pays de Pétrodollars et rouler sur l’or ; on peut se payer les meilleures architectures du monde ; mais que vaut le tout, quand la culture ne suit pas en parallèle ; que vaut le tout quand les citoyens sont laissés en marge.

Et de quelle culture parle-t-on, quand ceux qui ont les destinées culturelles de la ville entre les mains sont eux même, aussi bien incultes que corrompus ?

Il n’y a qu a jeter un regard sur la liste actuelle de nos élus, pour comprendre que la ville se fait Harakiri.

Sommes-nous masochistes pour nous imposer une telle épreuve ?

Toujours est il, qu en attendant Godot notre théâtre reste fermé une grande majorité du temps et quand ses portes finissent par s’ouvrir, O miracle, c’est pour y jouer du Chaabi et pour que les beaux fauteuils que « les messies » de la ville de Sète ont mis tant de soin a choisir et a mettre en place, ne soient pris, dans les moments de transe, pour une « JEFNA » …pour une mémorable “REKZA”

Ah si Molière savait

Abdellah HANBALI
Ahdate Doukkalia

Auteur/autrice