Entre le marteau des abattoirs et l’enclume de l’abattage clandestin

Des informations persistantes font état de la présence d’une importante quantité de viande non estampillée, provenant de l’abattage clandestin et écoulée impunément dans des souks hebdomadaires de la province d’El Jadida. Il faut dire que « les vendeurs » de viande non soumise au préalable au contrôle vétérinaire trouvent toujours leurs fournisseurs qui exercent dans la clandestinité dans certaines communes urbaines et rurales des Doukkala. Il est bien connu chez le commun des mortels que des garages insalubres s’ouvrent ici et la pour cette activité lucrative. Les marchés et souks hebdomadaires demeurent les lieux privilégiés pour l’écoulement de quantités importantes de viande d’origine douteuse. Dans les régions de Sidi Bennour et d’El Jadida, le phénomène dont les médias font souvent l’échos s’est ancré depuis des années. Les services de contrôle vétérinaire et de lutte contre la fraude parviennent difficilement a localiser les abattoirs clandestins où certaines personnes avides de gain facile, n’hésitent pas a se confectionner une fausse estampille pour faire croire que leur marchandise a bien été soumise au contrôle vétérinaire.

Sans aller plus loin, et puisque l’on parle du défaut d’hygiène sanitaire des viandes, il n’y a qu a faire un petit détour aux abattoirs des villes d’El Jadida et de Sidi Bennour pour se rendre a cette triste évidence… En effet, d’énormes carcasses de bovins sont exposées. Certaines sont tellement grandes qu elles touchent le sol et traînent par terre sans complexe. Des filets de sang s’écoulent des boucheries, et des odeurs nauséabondes flottent dans l’air. Une grande partie de ces carcasses ne présente aucun tampon sanitaire. Normal, soutient un vétérinaire écoeuré, les bêtes ont été égorgées dans la boucherie même, dans des conditions sanitaires déplorablesAu total, on considère qu a Sidi Bennour l’abattage fournit un tiers du marché de la. Un chiffre énorme si l’on en sonde les conséquences.

Mais l’abattage n’est pas le seul danger, témoigne notre vétérinaire. « Il y a aussi ce que l’on appelle la filière rurale. Il s’agit de bêtes abattues légalement dans des abattoirs de la région où les normes d’hygiène sont loin d’être respectés. l’eau est insuffisante et l’on a l’impression de nager dans le sang, alors que les normes nationales prévoient 400 litres d’eau par bête pour garantir une bonne hygiène. Les animaux, morts ou vifs, traînent par terre, dans des flaques immondes. l’abattage est brutal, puisqu il n’y a aucun moyen d’immobiliser mécaniquement la bête qui se débat. Les contrôles vétérinaires sont sommaires, et la viande est embarquée vers Sidi Bennour a l’air libre a bord des pick-up ou charrettes, ou encore, un camion datant plus d’une trentaine d’années appartenant a la municipalité de Sidi Bennour. De quoi rendre végétarien le plus carnivore d’entre nous3

Face a cette double concurrence – celle des abattoirs ruraux et celle des clandestins. Un éleveur Doukkali et client des abattoir de Sidi Bennour et sa région est catégorique: Tant que de la viande rentre a Sidi Bennour illégalement des souks, tant que l’on continuera de tolérer des filières clandestines, on condamne les abattoirs modernes a tourner en sous régime, au détriment du consommateur.

De leur côté, certains chevillards désertent leur outil de travail : trop cher, se justifient-ils. Ils se plaignent de ne pas avoir été consultés en amont du projet. Pourtant, ces abattoirs modernes, ont toutes les raisons de facturer cher leurs services. Contrôle vétérinaire, chambres froides, automatisée et marquage de la viande… les conditions y sont largement meilleures. Mais nous sommes sur un marché de consommateurs au pouvoir d’achat très réduit et pour lesquels le prix reste le seul critère. Un marché ou la qualité et l’hygiène n’ont jamais été considérées comme importantes. Le consommateur n’impose donc aucun standard a son commerçant. Au contraire, nombreux sont ceux qui réclament a leur boucher la viande des souks. Elle a la réputation d’être meilleure, parce que plus fraîche. Elle est vendue le jour de son abattage

Mohamed LOKHNATI
L’OPINION

Auteur/autrice