Ferracha : Anarchie dans un marché impopulaire

Mais ce sont plutôt ces «ferracha» qui imposent leur loi malgré les «opérations de nettoyage» menées par le caïd du deuxième arrondissement urbain. Grouillante d’activité, la chaussée est devenue le souk le plus impopulaire de toute la région. Un mélange pittoresque de commerçants et de vendeurs a la sauvette offrant «l affaire du jour» ou encore un bric-a-brac d’objets hétéroclites neufs ou vieillots, de la friperie et de différents produits de contrebande. Il ne s’agit pas d’un signe de prospérité. c’est beaucoup plus une tacite volonté de certains «mafiosi» de tenter de désactiver localement une vie économique paralysée ces derniers mois par une baisse constante du pouvoir d’achat. Beaucoup de «ferracha» occupent la voie publique tout au long de l’avenue Zerktouni ainsi que les places Allal El Kasmi et El Hansali. Une équipe d’agents, dirigée par le caïd du deuxième arrondissement urbain, leur fait quotidiennement la traque tout autant que les délinquants et les repris de justice aux aguets, les yeux a la recherche d’une poche, d’un sac ou d’un portable « distrait » a voler.

Jour après jour, on assiste impuissamment a l’infection de cette plaie béante de l’environnement d’El Jadida. Pratiquement, aucun espace n’est épargné par ce fléau social qui en dit long sur la gestion locale de la ville.
Une situation qui a aggravé davantage l’aspect de la sécurité des personnes. On assiste également a des « guerres de territoire » entre des gangs d’une autre ère. Et si, par malheur, on réclame un stationnement autorisé dans ces quartiers conquis, on n’est pas s»r de rentrer indemne. Une virée du côté de la place El Hansali, Allal El Kasmi, Zerktouni, Essafaa, El Barkaoui doit être pédestre. Utiliser un véhicule relève du suicide. Ces endroits sont devenus infréquentables tant que les vendeurs a la sauvette et ceux a la charrette squattent tous les trottoirs et les rues par leurs marchandises empêchent ainsi toute circulation routière.

Les habitants de ces quartiers ne cessent de se plaindre a qui veut les entendre, bruits et bagarre durant la journée. Le tapage nocturne est un autre mal auquel on ne voudrait pas, semble-t-il, trouver une solution. Durant ce mois de ramadan, la plupart des habitants d’El-Jadida semblent se préoccuper plutôt de leur quotidien. Certes, le chômage continue d’imposer a la majorité l’austérité. Mais ça et la, les chansons du chaâbi, raï, rap, les chebs et les chebbates font oublier les exigences de la vie. Des chansons qui, également, assourdissent les appels a l’aide matérielle et financière des mendiants qui par dizaines occupent les trottoirs et les abords de magasins, boulangeries, boucheriesRencontré au marché Allal El Kasmi, Mourad, un fonctionnaire, admet : «Les gens sont fatigués des promesses des pouvoirs publics qui ont a maintes reprises promis de mettre fin a cette anarchie, a cette pagaille.

Cette fatigue est plus perceptible durant ramadan. Rien ne bouge et les responsables semblent incapables de rendre a cette ville son calme».
proximité du marché Allal El Kasmi, piétons et automobilistes n’arrivent pas a circuler. Car les trottoirs sont squattés par les camelots des vendeurs a la sauvette. Ainsi, le commerce informel a conquis tous les espaces jusqu au jardin qui est en face de la Cité portugaise. Du côté de la place El Hansali et jusqu aux alentours de la place Mohammed V, l’endroit est envahi par les charrettes chargées de fruits et de légumes… Lors des rencontres formelles ou informelles, des avocats, médecins, opérateurs économiques et universitaires se révèlent politiquement critiques a l’égard des pouvoirs publics. Cette aigreur, qu ils chuchotaient jusqu ici, est exprimée de plus en plus ouvertement.

c’est vrai qu on essaie par tous les moyens «d éradiquer» ce phénomène de «ferracha», mais le problème qui se pose aujourd hui est de savoir combien durera son application dans le temps? Car, il faut le reconnaître, le commerce informel semble s’être durablement imposé dans certains lieux et le long de la corniche, surtout pendant la saison estivale a tel point que toutes les voies de circulation deviennent presque inaccessibles par les automobilistes. Nous ne nions pas que les autorités locales déploient de grands efforts dans ce sens, mais tant que certains agents malintentionnés continuent a «recevoir» du bakchich des ferracha», leur action sera vouée a l’échec. d’autre part, il faut signaler que presque tous les trottoirs et espaces pour piétons sont encombrés par les tables et chaises des cafés, des voitures ou carrément annexés comme s’ils faisaient partie de la propriété privée de ceux qui les ont annexés.

Pis encore, «Certains particuliers» ne se gênent plus pour faire main basse sur le domaine public et occuper abusivement les trottoirs en principe réservés aux piétons surtout dans les boulevards Mohammed VI et Mohammed V, place El Hansali, avenue ZerktouniL échec répétitif des opérations contre les commerces informels sonnent comme un aveu d’impuissance des pouvoirs publics contraints de montrer quelquefois les biceps, le temps que la ténacité de l’informel ne reprenne ses «droits» au grand dam des commerçants légaux et des habitants de ces quartiers « infestés ». Une chose est s»re, cette guéguerre est faite pour durer tant que certains agents corrompus jouent la comédie devant leurs supérieurs.

Immondices a même le sol

l’approche de l’heure du «Sohour», les uns et les autres commerçants, vendeurs a la sauvette et consommateurs désertent les lieux, laissant des tonnes de déchets, ordures et immondices un peu partout dans la ville d’El-Jadida, chef-lieu des Doukkala. Un petit tour a cette heure, le long des boulevards et de certaines rues perpendiculaires vous fait découvrir un état des lieux des plus lamentables avec la multitude d’immondices laissées a même le sol. Et c’est aux pauvres agents du service de nettoyage de nettoyer ces rues « privatisées » par des commerçants qui ne contribuent avec aucun dirham dans la gestion de la cité. Une image de désolation et une atteinte a l’environnement qui ne semblent pas inquiéter, outre mesure, les responsables de la ville.

Abdelmajid Nejdi
Eljadida.com

Auteur/autrice