LES MOULES DE DOUKKALA, UN RISQUE d’INTOXICATION POUR LE CONSOMMATEUR!

Vous les voyez a l’entrée d’El Jadida, juste a proximité de l’hippodrome Lalla Malika, des sacs de plastique plein de moules a la main, faisant signe aux automobilistes de s’arrêter pour leur vendre ces mollusques qui viennent directement d’un milieu naturel pollué situé a proximité d’un complexe d’industrie chimique dans la région de Jorf Lasfar et d’autre part …

Les acheteurs voire les vendeurs ne savent pas que ce mollusque (mytilus galloprovincialis) est contaminé! Pour ce, une équipe de laboratoire d’étude et d’analyse environnementale de l’université Chouaib Doukkali, a choisi deux sites d’études pour prouver cette contamination :

– site de Haouzia: ce site se trouve a 1km au nord de la ville d’El Jadida et a 28km au nord des rejets du complexe phosphatier de Jorf lasfar. Ce site est caractérisé par la présence d’un rejet mixte industriel (en provenance du site industriel) et urbain. Deux stations y ont été choisies (H1 et H2) :

Station H1 : situé a 1km du centre ville, elle reçoit directement des rejets mixtes et dont la plus grande et la plus accessible moulière de la ville.

Station H2 : elle se trouve a environ 500 a 800 m au nord de la station H1, la moulière y est moins étendue.

– site de Jorf Lasfar: situé a 25 km au site de la ville d’El Jadida, ce site est caractérisé par la présence du complexe de traitement des phosphates ” Maroc Phosphore III et IV” dont les rejets sont directement déversés an mer: deux stations (J1 et J2) y ont été choisies a différentes distances des rejets de ce complexe industriel.

Station J1 se trouve environ 500 au sud-ouest du rejet secondaire du complexe phosphatier : on y a trouvé des patelles et une très grande quantité de débris de coquilles de moules, preuve d’une grande mortalité!

Station J2 est situé a 1500m environ au sud de la station J1; les patelles et autres gasteropodes y sont un peu plus abondants. La moulière y est présente, mais elle est très peu étendue…

Une quarantaine de moules de l’espèce mytilus galloprovicialis ont été prélevées par station au mois de Mai et de Juin. Les prélèvements ont eu lieu a marée basse, dans la zone intertidale dans le médiolittoral inferieur.
Les animaux appartenant a la classe de taille 3 – 4 cm, ont été conservés dans l’eau de mer et transportés au laboratoire dans des glacières. Dés leur arrivée , les moules ont été brossées , lavées puis soumises aux conditions de purge qui consiste a les mettre dans l’eau de mer oxygénée durant 36 heures, afin d’éliminer le contenu de leur tube digestif et éviter toute interférence avec les métaux a doser dans les tissus des animaux (…) suite a l’expérience au laboratoire , les résultats ont montré que les concentrations les plus élevées en cadmium sont observées au niveau de la glande digestive chez les moules des stations J1 et J2 de Jorf Lasfar.

Les teneurs les plus faibles sont notées chez les moules de la station H1 (site Haouzia) au niveau du manteau.

L’accumulation de ce métal se fait préférentiellement au niveau de la glande digestive par rapport au manteau.

EN CUIVRE : les animaux des stations H1 et H2 présentent des teneurs en Cuivre plus faibles que celles relevées chez les moules des stations J1 et J2.
L’accumulation du cuivre est très importante au niveau des glandes digestives par rapport aux manteaux des animaux.

EN ZINC : globalement, l’accumulation du zinc chez les moules des stations étudiées ne montre pas de différences significatives ni selon le site ni selon l’organe, a l’exception des animaux de la station H1 qui présentent des concentrations significatives différentes entre les deux organes;
La teneur la plus élevée est observée dans la glande digestive des animaux de J2 et la concentration la plus faible est notée au niveau du manteau des moules de la station H2.

EN MERCURE : la concentration maximale du mercure est notée dans la glande digestive des moules des stations J1 et J2. Les animaux du site Haouzia présentent les teneurs les plus faibles dans la station H2.
L’accumulation de ce métal se fait de façon significative au niveau de la glande digestive par rapport au manteau.

Le présent travail a montré que les moules du site de Jarf-Lasfar sont les plus contaminées (rejets industriels). Cette bioaccumulation des métaux traces chez la moule de la région d’El Jadida connait une variation saisonnière très nette. Cette variation est susceptible d’affecter les processus physiologiques des ces bivalves.

Le site de Jorf-lasfar reste l’un des sites les plus pollués de la région d’El Jadida, comparé au site de Haouzia. Cette pollution métallique a probablement pour source les phosphogypses issus de la transformation des phosphates par l’acide évacué par le complexe phosphatier de la région (Maroc phosphore III et IV) d’ailleurs les teneurs métalliques observées sont comparables a celles relevées dans la région de Safi qui abrite elle-même le complexe (Maroc phosphore I et II). Cette pollution industrielle reste donc de loin, qualitativement et /ou quantitativement plus nuisible que celle de Haouzia!

Chez l’huitre creuse ” crassostrea gigas ” da la lagune de Oualidiya, le zinc parait plus concentré que le cadmium. Cependant, ils peuvent s’avérer nuisibles lorsque leur concentration dépasse un certain seuil.
Par ailleurs, les moules des stations du site industriel de Jorf Lasfar sont significativement plus contaminées que celles des stations du site essentiellement urbain de Haouzia.

Le site de Jorf lasfar est un site pollué. Les concentrations métalliques y sont très élevées, dépassant largement les normes internationales. Ces concentrations métalliques proviennent très probablement du complexe phosphatier de la région, sachant qu ils dont des sous produits des minerais de phosphate. d’autre part, la consommation incontrôlée et anarchique de ce bivalve peut s’avérer dangereuse pour les populations de la région Doukkala- Abda.

Avant de boucler ce chapitre nous ne pouvons laisser passer sous silence ce degré de pollution métallique constant nonobstant des recherches effectuées depuis belle lurette par les professeurs chercheurs d’éco-toxicologie de l’université Chouaib Doukkali!

Ce constat prouve- t-il que les stations d’épuration des unités industrielles ne sont pas fonctionnelles ? d’où le danger sur la santé public et sur la biodiversité marine dans le littoral Doukkali. La sonnette d’alarme est donc tirée aux citoyens et responsables d’en prendre conscience et d’être vigilants pour minimiser voire stopper les dégâts.

Abdellatif CHERRAF
Eljadida.com

Auteur/autrice