Week-end pas comme les autres

Avant de plancher sur cet article, l’idée m est venue de suivre la démarche du reporter averti en menant étroitement mon enquête auprès du public concerné, tout au long de ce week-end qui n’est pas considéré comme les autres ! En effet, le 18 février est frappé du sceau de la journée nationale de la sécurité routière, et tout un beau monde se démène pour en parler. On y rencontre les autorités compétentes, les associations, les médias et les religieux qui en ont fait leur serment du vendredi. Voyons donc la réaction des concernés.

Au prime abord, a part quelques banderoles de circonstance et certains agents munis de hauts parleurs, c’est le train-train habituel en ville. Si j entame mon sondage par le piéton, because les statistiques le présentent comme le dindon de la farce dans cette affaire! En zone urbaine, il constitue la moitié des tués par accident, sinon a la compagne, ce n’est guère reluisant, bien que la proportion soit revue au tiers. A l’annonce de ces taux aux sondés, la réaction est unanime; l’excès de vitesse en est la cause; l’occupation des trottoirs par le vendeur ambulant est souvent ressortie. Cependant, certains consultés n’hésitent pas a se jeter la pierre en dénonçant le promeneur distrait, pour qui, trottoir ou artère, c’est du kif-kif. En abordant le transport en commun, les esprits s’irritent! Certains piétons vont jusqu a traiter ses conducteurs de gibier de potence a cause de leur rallye quotidien au milieu de la ville. Le petit taxi n’est pas épargné non plus; la dégaine et le langage cru de certains conducteurs, soulèvent des doutes a propos de la sécurité du passager; il arrive parfois qu un chauffeur cavaleur se hasarde a joindre l’utile a l’agréable en invitant sa belle cliente a une promenade douteuse. Au centre-ville, le passage piéton ralentisseur est bien apprécié, mais il reste beaucoup a faire, sans oublier aussi l’éclairage public qu il faut intensifier par endroit. A propos des gaz inhalés, les transports en commun sont toujours a l’honneur! l’absence d’entretien chez ses exploitants, engendre des machines pollueuses au premier degré. Une vieille dame m en parle avec humour; si vous habitez près d’un arrêt du bus, c’est le cancer du poumon garanti, et si vous l’empruntez tous les jours, vous avez la pneumonie en prime! Décidément, la relation entre piéton et automobiliste n’a rien de l’amour tendre; A ma dernière question au piéton pour savoir s’il faut bien renoncer au moteur a explosion? Sa réponse est magique; oui, mais pas trop! J en conclue que l’invention de la roue n’était, peut-être, pas une bonne idée de l’Homo sapiens.

Bien que la dernière étude de notre parc automobile fixe une moyenne arithmétique de soixante deux voitures pour chaque mille habitants, la prolifération de ces engins est en nette progression grâce au crédit sésame. Si la capitale économique détient la moitié de ce parc, la grogne de l’automobiliste est du même degré dans tout le pays; a commencer par l’état du bitume. A chaque hiver, les nids de poule foisonnent sous des flaques d’eau, causant parfois de graves accidents aux itinérants. Ce week-end, la rouspétance de la plupart des conducteurs est contre la hausse permanente des prix du carburant. Pour le citoyen moyen ou le professionnel, cette escalade refroidira, a coup s»r, toute idée d’entretien mécanique a l’avenir. Quant aux règles du code de la route, tout le monde est blanc comme neige! Chaque conducteur sondé se contente de jeter la responsabilité des accidents sur des confrères qui ont eu leur permis de conduire dans une pochette surprise! Au passage, par sa traversée hasardeuse, le piéton est presque considéré comme une bête errante ! A propos des contraventions, rien de surprenant; la Police en prend pour tout son grade. Le retrait du permis de conduire est considéré comme une injustice. Les plus renseignés parlent d’un vide juridique utilisé abusivement par les ceintures blanches. Le montant du PV n’est point arrangeant, les quatre cent balles, une bagatelle chez les opulents, restent astronomiques chez le propriétaire d’une R12. Côté opposé, la prisonnière d’un 4×4 nickel, se laisse divaguer a propos de la situation catastrophique de nos routes, en faisant référence a son dernier voyage en Espagne. Sur ma question relative a l’utilisation de son char pour les petites courses, notre sondée semble ignorer tous les ravages de ce genre de bolide en ville; en tout cas, son temps est compté pour approfondir notre entretien, mais avant de me quitter, j ai eu droit a un beau sourire dentifrice !

Grâce au changement des mentalités, la présence de l’agent de circulation n’est plus ressentie comme une crainte, malgré l’exaction de quelques brebis galeuses, comme dans toute profession! Rencontré a ce propos, l’agent de circulation exhibe toute sorte d’infraction commise quotidiennement par les conducteurs et les piétons. Les peines encourues, ne semblent pas apporter de changement aux habitudes! Au sujet de la journée du 18 février, l’agent joue le jeu en m assurant que c’est mieux que rien, le chauffard a encore de beaux jours devant lui! Merci monsieur l’agent. Un peu plus tard, me voila sur la route de Casablanca pour me tuyauter auprès des gendarmes. Arrivé a mi chemin, la Gendarmerie Royale est de la partie; des jeunes distribuent des tracts pour la sécurité routière. Au vu de l’ambiance détendue, on pourrait se croire a une compagne électorale! Abordés sur le sujet, les gendarmes évoquent l’excès de vitesse et la somnolence comme sources d’accidents sur les grands axes routiers. Le pinard n’est pas blanc non plus dans cette affaire, les accidents par ivresse sont quasi répondus ! Puisque l’alcool est en vente libre, a quand donc l’alcootest pour se contrôler avant toute pompette ?

En fin de compte, en dehors du 18 février, il nous reste toute l’année pour boycotter ce chiffre noir qui est de dix morts par jour. En respectant la sécurité d’autrui, on devient garant de sa propre survie; et puisqu il faut bien mourir un jour, autant de s’éteindre dignement dans son lit.

Merci

Abdelaziz CHERIF

Auteur/autrice