Point de vue : La réforme de l’éducation

Notre pays a attendu trop longtemps pour promettre, enfin, de réformer son système éducatif malmené par des décennies d’improvisations malencontreuses, d’incohérences graves, d’apports inappropriés et de réformes avortées. Les décisions contradictoires et souvent incompréhensibles dans ce domaine très sensible ont évidemment co»té trop cher en temps et en argent mais surtout, elles ont créé un énorme clivage entre une masse qui a subi puis dérivé et une élite qui a profité puis avancé.

Aujourd hui, mise a part la levée de l’obstacle sur la langue d’enseignement des matières scientifiques grâce a une intervention royale, ce système n’en est encore, pour le reste, qu au stade des intentions et des projets. Ce sont certes des préalables nécessaires mais, compte tenu de la dégradation avancée de l’état de notre éducation, les préalables et les projets ne doivent pas s’éterniser. Le chantier doit démarrer et le plus tôt sera le mieux. De plus, chaque clan a parfaitement compris et mesuré ce qu il a perdu ou ce qu il a gagné et notre but, dans ce point de vue synthétique et global, n’est pas de retourner le couteau dans la plaie mais de dire simplement ce que nous entendons par une vraie réforme et ce que nous en attendons.

Ainsi, si nous décidons, par exemple, que notre enseignement devra cibler en priorité l’accès au savoir a l’ensemble de la population scolarisable ou la promotion du bon sens et de l’intelligence des apprenants ou la stimulation de leur imagination et de leur créativité, nous devons adopter un mode nouveau de fonctionnement et de gestion de l’affaire éducative parce que celui qui est en place ne favorise point la réalisation de tels objectifs. Ceux-ci ne sont pas du tout compatibles avec la prédétermination de ses hommes et de ses moyens.
De notre point de vue, pour parvenir a chacun des buts précités, il faudra auparavant soustraire l’enseignement a des catégories déterminées de responsables. Non qu ils soient inaptes a assumer de hautes charges mais leurs intérêts personnels et ceux de la pédagogie sont de natures entièrement opposées. Leur tourner le dos équivaut pour eux, au mieux, a un sacrifice improductif, au pire, a une aventure périlleuse.

Dans le tas, nous dénombrons principalement les politiciens parce que leur priorité c’est la conquête du pouvoir, leur outil de travail c’est la démagogie, leur souci, c’est l’intérêt de leurs partisans dont le profil et le nombre varient d’échéance électorale a une autre. Dans l’enseignement, par contre, la priorité c’est l’acquisition des connaissances établies, l’outil ce sont les méthodologies qui font preuve d’efficacité, le souci c’est l’ensemble de la population scolarisée. Que de différences !
Nous dénombrons aussi les commerçants parce que leur vocation naturelle c’est de gagner l’argent et non pas de favoriser l’apprentissage. Pour parvenir a cette fin, ils alternent séduction, harcèlement et chantage. Libérés de tout suivi et de tout contrôle, ils soumettent parents et personnel a leur tyrannie implacable et détournent la pédagogie de sa vocation normale. Il semble que l’Etat qui a opté pour la privatisation de ce secteur vital n’a pas mesuré les dangers de cette décision. Cette option est aussi dangereuse et aussi aberrante que de privatiser, par exemple, la sécurité, la justice ou l’émission de la monnaie dans le pays. Il en a découlé des conséquences d’une haute gravité. La qualification ne se mérite plus, elle se vend aux plus offrants. Tout l’environnement économique et socioculturel s’en trouve endommagé. Par conséquent, le retour a l’école publique obligatoire pour tous est, a notre avis, un choix indispensable et une solution incontournable. c’est un acte civique urgente et nécessaire.

De notre point de vue, l’élaboration des programmes d’éducation et d’enseignement et la détermination de leurs contenus doit être une affaire de professionnels qui établissent avec les vérités scientifiques et historiques, avec le rationalisme, la culture nationale et la culture universelle des rapports sereins, de confiance et de respect. Leurs travaux et leurs propositions doivent être, ensuite, soumis au jugement et a l’appréciation d’acteurs politiques (Parlement), économiques (Finances), sociaux (Associations et ONG) et médiatiques (Journalistes). Cet ordre nous paraît juste. Cette complémentarité nous paraît utile et nécessaire pour l’assainissement et la survie de notre enseignement.

AhmedBENHIMA
10/03/2016

Ahmed BENHIMA
Eljadida.com

Auteur/autrice